Une phlébite
Début avril, lors d’une courte promenade, la remontée de la côte conduisant à mon domicile s’avère un calvaire. Des douleurs à la jambe droite m’imposent de m’arrêter très fréquemment, au point d’hésiter à appeler mon fils aîné, à la maison ce jour-là, pour qu’il vienne me chercher en voiture. J’arriverai toutefois à rentrer par mes propres moyens, en faisant des pauses tous les 10 mètres.
Le lendemain au réveil je constate que ma jambe droite est anormalement gonflée. Je téléphone à mon médecin traitant qui me prend en consultation en début d’après-midi. Il m’envoie immédiatement faire un écho-doppler à Rennes. L’angiologue constatera rapidement la présence d’un gros caillot sanguin au niveau iliaque. C’est une thrombose profonde qui me vaut trois mois minimum d’injections quotidiennes d’un anticoagulant ainsi que le port de bas de contention. Il est vrai que cela faisait plusieurs mois que l’on ne m’avait pas découvert de nouvelle pathologie, le rythme habituel s’en trouvait désorganisé ! Cela me fait également appréhender d’une autre manière l’épisode douloureux au mollet de la mi-décembre. Il est fort probable que ce que j’avais attribué à une contracture musculaire était dû à la formation du caillot, tant les symptômes étaient similaires.
L’angiologue fait preuve d’indécision. Il m’avertit d’un risque d’embolie pulmonaire dans les 48 heures, risque certes faible mais non négligeable. Mon état ne semble pas nécessiter d’hospitalisation, il peut me laisser rentrer chez moi, mais il précisera sur l’ordonnance que j’ai bien été informé des risques encourus. Il me faudra m’adresser très rapidement au SAMU en cas de difficulté respiratoire ou de douleurs dans la poitrine. Avec mon épouse, qui m’a accompagné, nous discutons très longtemps avec lui afin de savoir s’il est préférable de m’hospitaliser ou non. Nous n’obtiendrons pas de réponse nette. Je choisis alors dans un premier temps de rentrer chez moi. Mais dans la salle d’attente où nous séjournons pendant que la secrétaire rédige les comptes-rendus, je change d’avis. Je réalise que je serai dans l’angoisse permanente. En effet, des difficultés de respiration, j’en éprouve déjà compte-tenu de la fatigue qui me fait m’essouffler très rapidement. J’ai déjà également éprouvé des sensations d’oppression dans la poitrine. Je serai sans cesse dans l’incertitude entre le risque de faire intervenir inutilement les urgences et le risque pouvant être fatal de ne pas les appeler suffisamment rapidement. On m’oriente alors vers un chirurgien qui m’examine et jugera préférable de me faire passer un angioscanner au vu de ma situation. Lorsque je le reverrai en visite pendant les deux jours que durera mon hospitalisation, il se montrera beaucoup plus sûr de lui et précis que l’angiologue et c’est tout à fait rassuré que je quitterai l’hôpital.
L’hématologue craint que le traitement contre la leucémie, en détruisant provisoirement mes défenses immunitaires, ne favorise le développement du cancer de la prostate, et souhaiterait qu’il soit opéré. Après discussion en équipe pluridisciplinaire, cette solution a été écartée. Toute thérapie intrusive comporterait des risques si une baisse trop importante du taux de globules blancs survenait dans la période suivant l’intervention. Il a donc été décidé de me proposer une radiothérapie. C’est à la mi-mai que débute le cycle des 37 séances qui me sont prescrites, à raison d’une séance quotidienne hormis les week-ends et jours fériés. Je bénéficie de la prise en charge des déplacements et choisis de faire appel à une compagnie de taxis conventionnée pour me rendre au centre de radiothérapie situé à 25 km de chez moi. Mon état de fatigue ne me permet pas de conduire en toute sécurité, ma vigilance est très amoindrie. Je ne conduis que rarement, et toujours sur de très courtes distances. Depuis la mi-mars je sors très peu de mon domicile, préférant mon environnement dans lequel je peux à tout moment trouver les positions qui me conviennent lorsque je suis pris par le besoin de me reposer ou de trouver une position confortable lorsque des douleurs se font sentir. Les effets secondaires de la radiothérapie ajoutent à mon inconfort.
Un nouvel écho-doppler de contrôle est effectué à la mi-juillet. Le caillot sanguin n’est pas complètement résorbé, il me faudra donc poursuivre pendant au moins trois nouveaux mois les injections quotidiennes d’anticoagulant et le port des bas de contention
Les séances de radiothérapie qui ont débuté le 16 mai prennent fin le 12 juillet. Place maintenant à la chimiothérapie destinée à combattre la leucémie !
Cette chimiothérapie peut être administrée selon deux protocoles, entre lesquels il me faut choisir. L’un consiste en l’injection de la totalité du traitement, de la leustatine, en sept jours consécutifs en injections sous-cutanées. L’autre, plus « classique », en l’administration de pentostatine en perfusion tous les 15 jours jusqu’à réponse complète au traitement. C’est à la veille de ce choix que s’arrête ce second récit.