Les « premières » vacances
Pour ces premières vacances après la maladie, décision est prise d’une destination pas trop éloignée permettant un retour occasionnel ou définitif à la maison en cas de nécessité. Ce sera le Finistère, plus précisément le Finistère sud. Depuis quelques années, nous consacrons une partie de nos vacances à la découverte d’une région à vélo. Nous nous implantons en camping dans une ville ou un village à partir duquel nous effectuons des boucles, en dessinant une sorte de marguerite. Les circuits journaliers s’échelonnent habituellement de 40 à 70 km, selon notre envie, notre forme, et le relief du parcours. Cette solution nous permet de ne transporter sur nos vélos que le nécessaire pour la journée : outils et matériel de dépannage, vêtements chauds et de pluie, pique-nique, eau, lecture et de quoi s’allonger en tout lieu pour se détendre et se reposer. Le soir nous pouvons retrouver un minimum de confort au camping, et n’avons pas la corvée de la désinstallation-réinstallation quotidienne. Pour la tranquillité, nous élisons domicile de préférence à l’écart des grands centres touristiques. Notre première destination finistérienne est Plonéour-Lanvern où nous découvrons un très accueillant camping municipal très calme, peu fréquenté en cette fin de juillet, et aux vastes emplacements bien délimités par des haies denses.
Pour notre premier circuit, nous choisissons de rallier par l’ouest la côte au plus près, puis de la longer jusqu’à ce que notre état de forme nous dicte de rentrer. Le temps est au beau fixe. Après le pique-nique du midi, nous faisons étape dans l’après-midi chez des amis qui ont une maison secondaire à Léchiagat. C’est l’occasion de prendre un café, puis d’aller papoter sur la plage. Cela nous permet une longue pause avant le retour à Lonéour vers 18h30 (nous étions partis vers 11h). Nous constatons que nous avons roulé 57 km à une moyenne d’environ 14 km/h. Mais nos vitesses moyennes sont à relativiser. Elles sont calculées par un compteur dont j’ai équipé mon vélo, et qui ne prend en compte que les temps de route effectifs. Les nombreux arrêts pour faire le point sur la carte, se désaltérer, admirer le paysage ou un site remarquable, la pause repas n’entrent pas dans ce calcul. Cela représente tout de même, sur une sortie complète, près de deux heures de pauses diverses. A l’arrivée je ne me sens pas particulièrement fatigué. Le parcours était plat, avec quelques passages dans des chemins ensablés sur lesquels nous avons dû avancer vélo à la main en raison d’erreurs de repérage sur la carte.
Le lendemain nous décidons, pour varier nos circuits, d’éviter la côte et de nous diriger vers l’Odet. Là nous constatons que le parcours est beaucoup plus accidenté car nous devons traverser plusieurs vallées. Nous raccourcissons donc légèrement les distances par rapport à ce que nous avions prévu. De plus nous ne devons pas rentrer top tard car nous sommes invités pour le dîner chez nos amis rencontrés la veille. Nous sommes de retour vers 16 h et avons effectué 43,5 km. Je suis content d’arriver car la fatigue se fait une peu sentir. Je profite de faire une sieste afin d’être en forme le soir. Nous passons une très agréable soirée, bien arrosée, autour d’un copieux plat de langoustines fraîchement pêchées achetées à la criée, et nous voilà de retour à notre tente à 2h du matin pour une courte nuit car je dois me lever au plus tard à 8h30. C’est en effet le jour de mon bilan sanguin protocolaire bihebdomadaire, et j’ai pris rendez-vous avec une infirmière à 9h pour une prise de sang qu’elle viendra effectuer au camping, une expérience nouvelle pour elle aussi.
Je suis réveillé tôt, vers 7 h, et me lève vers 7h 30. Un coup de fatigue après le passage de l’infirmière me contraindra à m’allonger pour poursuivre ma nuit écourtée. Départ vers 11 h pour un nouveau circuit en direction de la côte. Nous ne l’atteindrons pas. Au bout d’une vingtaine de kilomètres, voyant que la boucle prévue nous conduirait à effectuer 50 à 60 km, et ne me sentant pas en mesure de les supporter, nous décidons le retour par une autre route. Après le pique-nique du midi, prolongé par une petite sieste, la reprise est particulièrement difficile. Nous avions choisi un parcours plutôt plat, et les moindres côtes, pourtant légères, me sont pénibles. Notre circuit se termine par un raidillon que j’ai bien l’intention de monter vélo à la main, mais une fois sur place, sans doute par défi, je tente tout de même l’aventure de le gravir en pédalant. J’y parviens et en éprouve un peu de fierté. Mais je suis très fatigué et vais me reposer dès l’arrivée. Notre promenade du jour n’aura donc été « que » de 36 km, sur un terrain relativement plat. Je décide de nous octroyer, le lendemain, une journée de repos sans bicyclette, que nous consacrerons aux visites de villes.
Le soir le temps est couvert et humide. Il ne fait pas très froid mais en raison de la fatigue je ne parviens pas à me réchauffer malgré plusieurs couches de vêtements chauds. Je somnole un peu sous la tente, puis vais me réfugier dans la voiture où j’écoute la radio, trop fatigué pour parvenir à lire et pas suffisamment pour dormir. Je vais enfin me coucher vers 22h30, 23h, et dormirai jusqu’à 9h30. Au réveil, j’ai les yeux gonflés de fatigue, ou d’avoir trop dormi. Je me sens de toute façon las, peu de force et d’énergie et comme dans un état second. Je réussis malgré tout à enfourcher mon vélo pour me rendre à la boulangerie acheter mes deux croissants quotidiens, petit luxe des vacances, ainsi que le pain pour les repas de la journée.
Nous partons pour Quimper en fin de matinée où nous déambulons dans les rues anciennes de la ville ; y ont survécu au temps et à l’histoire de nombreuses maisons d’architecture moyenâgeuse. La marche m’est difficile en raison de douleurs dans le bas du dos. Dans notre périple nous gravissons une rue en forte pente que je monte difficilement ; mes jambes sont lourdes et mon souffle court. Nous aboutissons dans un jardinet où je profite d’un large banc en pierre pour faire quelques étirements soulageant mon dos douloureux. Nous rentrons en milieu d’après-midi au camping où j’occuperai mon temps à la lecture sous un soleil réapparaissant. Je sens peu à peu ma forme revenir et prépare un circuit vélo pour le lendemain.
Ce dimanche 1er août, je me réveille vers 7h mais paresse dans mon sac de couchage jusqu’à 8h30, ne sentant pas le soleil percer à travers la tente. Le temps est maussade, très couvert. Le crachin intermittent nous rappelle que nous sommes en Bretagne. Nous traînons, hésitons à prendre le vélo ce jour-là. Finalement nous décidons d’enfourcher nos deux roues et ne partons que vers 11h sous une légère bruine, en direction de l’ouest, vers la côte que nous longerons pendant une bonne partie du circuit prévu. Le relief est relativement plat et je me sens bien. Nous pique-niquons à Penhors, sur un banc face à la mer, l’immense baie d’Audiern s’étirant à perte de vue à nos pieds. Lorsque nous repartons je n’éprouve pas la terrible sensation de fatigue habituelle. Le retour se fera par l’intérieur des terres, sur un parcours beaucoup plus accidenté, fait d’une succession de descentes et montées aux pentes parfois bien accentuées, mais jamais très longues. Mes sensations sont bonnes et je ne ressens pas de difficulté particulière. Un seul impératif toutefois : il m’est impossible de gravir rapidement les courtes pentes comme je le faisais auparavant, mes muscles devenant vite douloureux, sans doute en raison d’un manque d’oxygène. Il est vrai que mon taux d’hémoglobine stagne aux alentours de 11 g/dL depuis le début de mon traitement. Nous rentrons vers 15h. Je ne me sens nullement fatigué, et suis prêt à affronter une nouvelle journée de vélo.
Le lundi nous décidons de délaisser la côte pour une expédition dans les terres. Au moment du départ la motivation me manque et je décide de m’élancer malgré tout, plus par volonté que par envie. Les jambes ne répondent pas trop mal mais je ne me sens toutefois pas en grande forme. Ce n’est finalement qu’apparence car sur un parcours vallonné où les zones plates sont rares, je m’en tire assez bien et réussis à tout grimper. Les sensations s’améliorent au fur et à mesure de la balade. Par prudence nous choisissons de limiter les distances et finirons même par être de retour au camping à l’heure du pique-nique. Nous en profitons pour aller jusqu’à la criée du Guilvinec assister à la spectaculaire arrivée des bateaux de pêche entre 16h et 17h.
Ce mardi nous plaçons les vélos sur la voiture pour nous rendre à côté d’Audierne. Nous avons en effet projeté de faire le tour du cap Sizun. Nous nous garons à Esquibien, point de départ prévu de notre périple. Nous évitons la départementale avec sa circulation routière trop intense à notre goût en bifurquant à chaque petite route que nous trouvons. Plus loin nous avons l’heureuse surprise de constater qu’il a été aménagé un véloroute permettant de circuler en toute sécurité sur des petites routes et des chemins jusqu’à la pointe du Raz où nous pique-niquons face à la mer en compagnie de goélands très attentifs à la nourriture que nous pourrions leur lancer. Mais nous devrons écourter notre pause car le soleil n’est pas au rendez-vous, le temps est très couvert et la bruine se fait de plus en plus dense. Nous repartons et décidons de raccourcir notre parcours en prenant la route centrale sinuant à travers les terres plutôt que la route côtière. Notre circuit est assez accidenté, montées et descentes se succèdent. Certaines pentes sont ardues, mais peu longues. Nous progressons sous la pluie rendant notre balade moins agréable, mais heureusement je me sens en forme. Je m’offre un petit moment d’orgueil en m’attaquant à un raidillon très pentu que je décide de monter à vélo. J’arriverai en haut, certes à bout de souffle, mais fier d’avoir surmonté la difficulté. Nous rejoignons la voiture et décidons de faire un petit détour par Pont-Croix, village perché offrant aux visiteurs quelques rues très anciennes, au sol encore pavé. Nous y éprouvons la sensation d’un bond de deux siècles en arrière dans le temps. Nous descendons puis remontons deux rues typiques où ce sont les décrochements de rangs de pavés qui font office d’escalier.
Le mercredi nous avions prévu un circuit en huit dont le centre aurait été Douarnenez. Mais la météo nous fera changer de programme à la dernière minute. Le froid du matin et l’annonce de pluies probables dans la journée nous conduit à décider la visite de Concarneau qui possède une vieille ville fortifiée. J’éprouve dans l’après-midi quelques coups de fatigue qui ne me feront pas regretter le report de notre balade en vélo ; j’aurais sans doute éprouvé de grandes difficultés sur ce parcours qui s’annonçait difficile dans un secteur particulièrement vallonné.
Le soir nous avons programmé une soirée dégustation de produits de la mer avec nos amis de Lechiagat. Nous nous rendons dans un restaurant du Guilvinec et avons la bonne surprise de constater qu’est organisé ce soir-là un concert de jazz. On nous installe tout près de l’endroit tenant lieu de scène, et nous profiterons d’une soirée inoubliable : les clients désertant peu à peu les lieux, nous finirons par avoir droit à une prestation pratiquement privée dans la troisième partie du concert, ce qui nous permettra une intimité rare avec les musiciens. J’en repartirai avec l’envie de reprendre en main la guitare que j’ai un peu abandonnée ces dernières années après m’être pris de passion pour le bouzouki irlandais.
L’amélioration du temps n’étant pas au programme de Météo France dans les jours à venir, nous décidons de lever le camp le lendemain. Notre séjour finistérien s’arrêtera là pour ces vacances. Retour à la maison le jeudi.
Après quelques jours consacrés à la remise en ordre de la maison et à la reprise en main des instruments de musique, Christiane me propose dans le milieu de l’après-midi du dimanche de faire une balade en vélo. Je ne suis pas très motivé, ni très en forme, mais accepte de me laisser convaincre à la condition que ce soit elle qui prévoit l’itinéraire et dirige la sortie. Elle nous concocte un parcours aventureux à partir d’une carte au 25 000ème assez ancienne, en testant quelques sentiers pédestres avec nos deux roues. Nous nous lançons et sommes assez rapidement contraints de réajuster l’itinéraire après avoir suivi, vélo à la main, quelques chemins creux embroussaillés et dû poursuivre le long d’un champ de maïs avant de retrouver une voie praticable. Nous rencontrons un peu plus tard un itinéraire vélo balisé que nous suivrons un bon moment, acceptant de nous éloigner de Montfort, ce qui allongera les distances initialement envisagées. Finalement, alors que nous n’avions prévu de faire qu’une courte balade, ma forme s’est améliorée au long de la promenade et nous avons effectué 32 km à la moyenne de 15,5 km/h, sur un parcours au relief très légèrement vallonné. Sachant que les longues parties que nous avons faites vélo à la main entrent dans la moyenne, nous n’avons pas à rougir de notre performance de ce dimanche !
Cette semaine nous laissons nos vélos sur leur support dans le sous-sol. Nous irons passer quelques jours en famille à Trégastel. Ce sont jours de grande marée et notre dernier enfant en profitera pour aller avec ses cousins explorer leurs habituels « trous à pêche miraculeuse » dans les rochers. Au menu crevettes roses, étrilles, et avec beaucoup de chance peut-être un homard ! Je profite du séjour pour faire quelques marches le long du sentier côtier, de la Grève Blanche à Coz Pors. Le retour par le bourg me permet de mesurer la fréquentation touristique de l’été. Depuis quelques jours j’éprouve quelques instants de mal être après le repas du midi au cours duquel je prends ma dose quotidienne de Glivec : sensation de digestion difficile et de fatigue intense. Heureusement, une courte sieste suffit à faire passer le malaise et à me redonner un minimum d’énergie. Il me faudra en tenir compte lorsque je reprendrai le travail, en m’organisant un temps de repos le midi, à moins de décaler au soir la prise du médicament si c’est lui le responsable.
Un de ces petits instants fugaces de bonheur que j’ai appris à saisir pleinement lorsqu’ils se présentaient : je suis assis à une terrasse de bar face à la plage de Coz Pors, ce mercredi après-midi ensoleillé, et j’admire le paysage nouveau que m’offre la mise à nue des saillies rocheuses de cette côte de granit rose par marée basse avec une mer très retirée en raison d’un gros coefficient de marée. De nombreuses lignes seront écrites à cet endroit, au cadre particulièrement inspirateur. Le lendemain, au même lieu, dans les mêmes conditions, le charme n’opère pas. Je crois qu’il n’existe d’instants magiques que par l’état d’esprit dans lequel vague notre âme.
Jeudi soir nous sommes allés au Toucouleur écouter un musicien et chanteur de blues, Mathieu Pesqué, guitariste au talent fou. Quel lieu extraordinaire que le Toucouleur ! Durant la saison estivale, ce café-concert associatif propose depuis vingt ans plusieurs concerts hebdomadaires avec des musiciens et groupes professionnels de renom. S’y font entendre principalement de la musique celtique et du blues. C’est véritablement un endroit à ne pas manquer à Trégastel, si toutefois l’association n’est pas contrainte de mettre les clés sous la porte ; en effet, les subventions indispensables à leur programmation viennent de leur être supprimées.
Retour à la maison le vendredi car le samedi m’attend une épreuve. Je vis au rythme de mon organisme : je n’entreprends d’activités que s’il m’y autorise, et les interromps dès qu’il me le commande. Ce jour-là je vais devoir tester mon aptitude à suivre un rythme imposé. Nous avons dû louer un appartement à Rennes en colocation entre ma fille et mon fils cadet pour leur rentrée universitaire, et nous prenons possession des lieux ce jour-là. Le programme de la journée est le suivant : emménagement des quelques meubles dont disposent les enfants et de leurs affaires de travail dans l’appartement situé au premier étage, état des lieux détaillé (l’expérience de l’état des lieux de remise de logement de ma fille le mois précédent nous a rendus très prudents et tatillons), achat et transport d’un réfrigérateur, demande d’ouverture des compteurs d’eau, de gaz et d’électricité auprès des organismes concernés. J’ai la satisfaction de constater que je réussis les figures imposées. L’entraînement des sorties vélo n’y est sans doute pas étranger. Je suis toutefois content d’être de retour à la maison en fin d’après-midi, et n’aurai pas l’énergie suffisante pour travailler mes instruments de musique. Je laisserai lâchement Christiane préparer seule le repas et ressentirai un coup de fatigue dans la soirée.
Le temps frais et pluvieux a un triste parfum de fin de vacances et nous rappelle à la nécessité de préparer la rentrée scolaire qui s’annonce. Nous avions envisagé de repartir quelques jours faire du vélo dans une région limitrophe avant la fin août, mais jusqu’à présent la météo défavorable ne nous l’a pas permis.
Je profite de ce mardi pluvieux pour préparer ma rentrée scolaire. Ces dernières années je faisais classe à des élèves de CM2. Les contraintes professionnelles sont devenues très lourdes depuis quelques temps pour les enseignants de CM2 : évaluations nationales en janvier, dossiers d’orientation pour les élèves le nécessitant dans la même période, organisation et passation des brevets informatique et Internet (B2i), constitution des dossiers scolaires à destination des collèges, avec l’obligation nouvelle de remplir pour chaque élève un document supplémentaire, le socle commun des compétences. Tout cela s’ajoute à la responsabilité de préparer dans les meilleures conditions les enfants qui nous sont confiés à « affronter » le collège. De plus existe une forte tendance des enseignants des classes précédentes à compter sur les enseignants des classes suivantes pour pallier les lacunes. Craignant de ne pas être en mesure d’assurer pleinement mes tâches professionnelles, étant de surcroît en mi-temps thérapeutique, j’ai préféré prendre une classe de CM1 qui se libérait. J’avais déjà enseigné à ce niveau, mais je ne peux me contenter de reprendre sans amélioration et réajustements mes documents antérieurs. Il me faut revoir progressions et emploi du temps, et organiser le travail à mi-temps puisque je reste responsable de la classe. J’avais déjà tenté les semaines précédentes de m’investir dans ce travail, mais sans succès, l’énergie et la capacité de concentration me faisant défaut. Je constate avec satisfaction que je réussis à travailler une bonne partie de la journée. Je retrouve même un peu d’enthousiasme et de soif d’enseigner, et entreprends dans la soirée de mettre de l’ordre et de classer les documentaires variés diffusés à la télévision que j’ai enregistrés ces dernières années dans l’éventualité d’un usage pédagogique. Il me faut nettoyer ces enregistrements des parties inutiles, retrouver sur Internet les fiches programmes détaillées et entrer toutes ces informations dans une base de données. Encore de trop longues heures passées devant l’ordinateur qui entraînent fatigue oculaire et douleurs squeletto-musculaires diverses !
La semaine est également consacrée à la poursuite de l’installation de nos deux derniers enfants dans leur appartement rennais, aux ultimes démarches auprès des fournisseurs d’eau, de gaz et d’électricité et de l’agence de location pour les réfections à effectuer.
Nous guettons l’évolution de la météo qui nous annonce un temps relativement beau pour la fin de la semaine. Je prépare donc en hâte notre équipement de camping ainsi que nos vélos et nous voilà partis en direction de la Mayenne où nous nous installerons dans la ville de… Mayenne pour trois jours de randonnée cycliste. Nous nous sommes munis du minimum afin de réussir à transporter nos deux vélos dans le coffre de notre Berlingo sans devoir installer le porte-vélos sur le hayon arrière. Exit donc le matériel lourd de cuisine, le réchaud et sa bouteille de gaz. Le midi nous pique-niquons et le soir nous nous contenterons de salades composées. Une bouilloire électrique nous permettra tout de même de bénéficier de boissons et d’un petit déjeuner chauds. Le jeudi soir, à l’heure du repas, nous nous apercevons que mon zèle à la réduction vaisselière a été si efficace que j’en ai oublié… les assiettes. Nous mangeons donc dans des bols et nous équiperons en assiettes en carton ou en plastique pour les jours suivants.
Mayenne est une ville bâtie de part et d’autre de la rivière La Mayenne, sur des coteaux escarpés imposant de monter et descendre des raidillons tout au long des déplacements dans la ville dont certaines rues très étroites rendent la cohabitation difficile entre cyclistes et automobilistes contraints de patienter derrière des vélos gravissant les côtes avec peine. L’artère fluviale que constitue le cours d’eau apporte un charme incontestable à cette cité que l’on devine industrielle par les nombreuses usines et entreprises qui y sont implantées. Nous avons monté notre tente dans un camping situé au bord de cette paisible rivière.
Le vendredi nous adoptons un rythme de villégiature en nous levant à… 10h. Il est vrai que j’ai été réveillé très tôt, vers 5h, par mon matelas pneumatique défectueux qui a lui aussi choisi de décompresser. Je n’ai réussi à retrouver le sommeil que beaucoup trop tardivement, ce qui explique ce réveil en milieu de matinée. Malgré un petit déjeuner rapide, nous ne sommes partis que vers 11h30 car il nous fallait encore préparer l’équipement des vélos et vérifier le gonflage des pneus, ce que j’avais omis de faire la veille.
Le début du parcours est accidenté tandis que nous suivons les petites routes proches de la rivière, puis nous trouvons une ancienne voie ferrée aménagée en voie verte sur laquelle nous roulons quelques kilomètres. Par la suite le tracé ne sera que légèrement vallonné. Le paysage est suffisamment agréable et varié pour nous faire oublier les 56 km effectués. Je suis surpris par mes muscles qui répondent bien, et mon souffle pas trop mal. Les promenades en vélo des semaines précédentes ont constitué un entraînement efficace. Il est vrai également que ma dernière prise de sang a révélé une remontée du taux d’hémoglobine à 11,8 g/dL, un luxe que je ne m’étais pas offert depuis longtemps ! Nous verrons les jours suivants si cette « longue » sortie n’a pas trop puisé dans mes réserves. Autre signe encourageant : pas de virulent coup de fatigue d’après repas habituellement ressenti même après des nuits agitées comme celle que je viens de passer.
Nous nous levons à une heure beaucoup plus matinale le samedi, ce qui nous permet d’être prêts à partir vers 10h. Nous débutons par une vingtaine de kilomètres très faciles puisque nous suivons le chemin de halage de la Mayenne. Les fréquentes zones ouvertes sur le paysage rendent le parcours attrayant et nous longeons parfois quelques prairies évoquant des alpages. Lorsque nous quittons la rivière pour rejoindre les hauteurs de la vallée nous devons gravir une côte très pentue en haut de laquelle j’arrive à bout de souffle avec l’impression que ma cage thoracique va éclater. Mais les jambes ont suivi et je n’ai pas posé pied à terre. Nous suivons ensuite quelques lignes de crête nous offrant un magnifique panorama sur cette région agricole où les élevages sont nombreux. Nous passons par Jublains, site de remarquables vestiges gallo-romains du début de notre ère méritant une visite. Nous aurons effectué 70 km sans que je ressente de véritable fatigue. J’en oublierais presque le cancer et la chimiothérapie !
Nous partons vers 10h le dimanche matin pour un parcours plus vallonné que les jours précédents. Nous gravissons une longue côte qui nous élève jusqu’à un point culminant à environ 300 m d’altitude où nous sommes récompensés par un superbe point de vue sur la région qui s’étend à nos pieds à des kilomètres à la ronde. Nous poursuivons jusqu’à Lassay les Châteaux où nous nous octroyons un pique-nique de luxe assis sur un banc près d’un paisible étang au pied de la citadelle que nous admirons tout en dégustant notre traditionnel saucisson sec. Nous aurons tout de même parcouru 62 km dans la journée, sans que j’éprouve de défaillance, ce qu’auraient pu me laisser craindre les longues sorties des jours précédents. Notre moyenne est légèrement redescendue à 15,5 km/h, ce qui est compréhensible compte-tenu du relief du circuit, mais elle reste toutefois étonnamment élevée. Ainsi donc est-il possible, par un entraînement progressif et de la patience, de retrouver un niveau de forme physique plus qu’acceptable malgré mon GIST et le traitement ! Voilà de quoi « booster » mon moral ! Autre signe sans équivoque de cette forme retrouvée : tandis que lors des premières balades de la saison je roulais mécaniquement, la « tête dans le guidon », davantage préoccupé par les efforts que je devais faire, je profite dorénavant pleinement du paysage et n’hésite plus à faire le moindre détour pour être certain de ne manquer aucun lieu intéressant.
Le lendemain, jour de retour à la maison et donc de repos cycliste, tombe à point : les jambes sont lourdes et le souffle court. Il m’aurait sans doute été impossible de faire une longue sortie, encore moins si le terrain avait été accidenté. Mais Christiane est dans le même état, qui n’est donc certainement pas imputable à la maladie et au traitement, mais plus sûrement au simple besoin de récupération de l’organisme.
La période des vacances est compliquée pour le suivi du traitement. Mon ordonnance de Glivec étant arrivée à échéance, le lundi 22 août, une dizaine de jours avant la fin de ma dernière boîte de médicament, je téléphone au secrétariat de mon oncologue pour demander une nouvelle ordonnance. N’ayant toujours rien reçu en fin de semaine, le vendredi, jour de ma prise de sang bihebdomadaire, je tente de recontacter le secrétariat pour relancer ma demande en même temps que pour faire le point sur les résultats d’analyse. Mais il est fermé, et ne rouvrira que le lundi suivant à 11h. Le lundi la secrétaire que j’ai au bout du fil fait le nécessaire pour l’ordonnance que je recevrai dès le lendemain, mais me demande de rappeler le mardi car mon taux de globules blancs est bas et elle souhaite demander l’avis de l’oncologue qu’elle ne pourra joindre que le lendemain. J’apprendrai qu’il me faudra modifier le dosage de Glivec en passant de 400 mg à 300 mg. Une nouvelle ordonnance va m’être envoyée. La pharmacie ne dispose pas de ce médicament très spécifique en stock, il me faut donc en passer commande 24 h à l’avance. C’est donc sans ordonnance que je dois expliquer au pharmacien qu’il ne doit pas demander la boîte habituelle mais un autre dosage, et qu’il ne me sera peut-être pas possible de lui fournir l’ordonnance immédiatement. Il me fait heureusement confiance : le prix du produit se chiffre tout de même en milliers d’euros (2500 euros pour une boîte de 30 comprimés de Glivec 400 mg !). Finalement tout se passera sans problème grâce au courrier qui aura fonctionné rapidement et au pharmacien compréhensif.